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L'échec scolaire se conjugue au masculin

En France, dès le plus jeune âge, les filles creusent l'écart à l'école avec les garçons. Un avantage qui se confirme au fil des années. Du coup, beaucoup s'inquiètent des conséquences de ce retard sur certaines professions, excessivement féminisées.

Mercredi 17 novembre. L'amphithéâtre Cézanne, au coeur de Marseille, est plein à craquer. Ils sont venus par dizaines, des quartiers nord de la ville, d'Aix, d'Aubagne, de Digne. Ils sont enseignants dans des écoles élémentaires, professeurs du second degré et proviseurs de lycée. Loin des sempiternels débats sur la violence à l'école, ces professionnels de l'éducation sont réunis pour parler d'un sujet longtemps tabou mais auquel ils sont confrontés tous les jours : le décrochage scolaire des garçons. Alors, pendant tout l'après-midi, ils racontent leur quotidien, échangent des "trucs" de profs et commentent quelques expériences pilotes. C'est Jean-Louis Auduc, le directeur adjoint de l'Institut universitaire de formation des maîtres de Créteil, en banlieue parisienne, qui mène la discussion. Ce vieux sage de la pédagogie a publié il y a près d'un an un brûlot intitulé Sauvons les garçons ! Il y dresse un portrait sexué de l'échec scolaire. "Le constat chiffré est implacable : filles et garçons ne sont pas égaux en classe", assène-t-il. 

42% des garçons de 17 ans sont au lycée, contre 55% des filles. A peine plus d'un sur trois ira en licence contre la moitié des filles. 

La parité est atteinte dans les écoles de commerce

Sur les 150 000 jeunes qui sortent chaque année sans diplôme du système scolaire, plus de 100 000 sont des garçons. Et ces derniers représentent la grande majorité des effectifs des dispositifs réservés aux élèves en rupture scolaire. "La fracture sexuée a atteint de tels écarts sur certains paramètres, comme la compétence en lecture ou la compréhension d'un texte, qu'elle est presque plus déterminante que la fracture sociale", constate Jean-Louis Auduc. Par un effet de miroir inversé, la réussite des filles en apparaît presque plus éclatante. Certes, elle ne date pas d'hier. L'image de la bonne élève studieuse et appliquée éclipsant le cancre rêveur à la Doisneau fait partie du patrimoine scolaire. Mais l'écart s'est creusé au fil des années. 

 
 

Aujourd'hui, à l'âge de 17 ans, 55 % des filles sont au lycée, contre 42 % des garçons. A 20 ans, plus de la moitié sont en licence, alors que seulement 36 % des garçons atteignent ce niveau. Résultat : ce qu'on ne peut plus qualifier de "sexe faible" a envahi les bancs des universités - les filles représentent désormais 56 % des étudiants du supérieur. Certes, l'ENA, Polytechnique, l'Ecole des mines, les Arts et Métiers, se féminisent doucement. 

Mais la parité est largement atteinte dans les écoles de commerce, et les filles représentent 55 % des effectifs des classes préparatoires économiques. En médecine, dans les écoles vétérinaires, dans la magistrature, dans les écoles d'architecture ou de journalisme, elles fournissent jusqu'à 80 % des élèves. Surtout, le bastion masculin des mathématiques commence à être attaqué. Au bac S, 31 % des filles décrochent une mention bien ou très bien, contre 25 % des garçons. Ces deux dernières années, certains lycées qui proposent des classes préparatoires scientifiques aux grandes écoles ont même été obligés d'ouvrir en catastrophe des internats pour filles afin de faire face à la poussée de la demande. 

"Ce mouvement de ciseau s'observe dans la plupart des grands pays, mais il est plus marqué en France qu'ailleurs, alors que le nombre d'élèves en difficulté a doublé en l'espace de dix ans", observe Eric Charpentier, spécialiste de l'éducation à l'OCDE. Le ministère de l'Education, dont les titulaires successifs n'ont cessé de déclarer la guerre à l'échec scolaire, reste muet sur le sujet. Dans l'école de la République, l'élève est asexué. "Nous en restons à l'état de constat. La réflexion sur le décrochage scolaire n'intègre pas la dimension du genre", explique dogmatiquement Anne Rebeyrol, chef de la mission prévention des discriminations et égalité filles-garçons au ministère de l'Education. 
 

56% des étudiants du supérieur sont des filles. Ce chiffre atteint 80% dans la magistrature, l'architecture, le journalisme ou les écoles de vétérinaires. 

Huit dyslexiques sur dix sont des garçons

Reste que médecins, psychologues et pédagogues continuent de s'écharper sur les causes du phénomène dans des débats aussi acharnés que ceux qui opposaient les théologiens byzantins à propos du sexe des anges. Et l'on retrouve l'éternel débat entre l'inné et l'acquis. "Le cerveau n'a pas de sexe. Il n'y a aucune différence de capacité cérébrale entre les filles et les garçons", martèle Catherine Vidal, neurobiologiste et chercheuse à l'Institut Pasteur. 

A la naissance, le cerveau compte 100 milliards de neurones, mais seulement 10 % des connexions neuronales sont finalisées. "Une plasticité du cerveau", selon l'expression de cette scientifique, qui dépend donc de l'environnement social, culturel, et des stimulations que l'enfant va recevoir de son entourage. Selon les psychologues, les petites filles, davantage stimulées pour parler que les garçons - dont on valoriserait plus l'action -, seraient donc mieux armées pour les travaux scolaires dès la petite enfance. 
 

A cette thèse "extérieure", les médecins ajoutent une touche de génétique. Aujourd'hui, huit dyslexiques sur dix sont des garçons, et la proportion est presque identique concernant la dyspraxie visuo-spatiale, une pathologie encore peu connue mais qui entraîne également des troubles de l'écriture et de la lecture. 

Une féminisation qui peut poser problème

Alors, doit-on remettre en cause la mixité ? "Oui, il faut que l'école revienne sur le mythe de la mixité en réservant des temps séparés dans la semaine pour des apprentissages différenciés selon les sexes", n'hésite pas à affirmer Jeanne Siaud-Facchin, psychologue et fondatrice des centres Cogito'Z, dédiés aux élèves en difficulté. 

Dans les filières du supérieur, où les filles excellent aux concours écrits, écrasant les garçons, on commence à s'interroger sur les moyens d'attirer davantage d'étudiants mâles. "Et pourquoi ne pas rétablir des quotas ? Tout est ouvert", lance, un peu bravache, Jean-Paul Mialot, le directeur de l'Ecole nationale vétérinaire de Maisons-Alfort. Selon lui, la féminisation de cette profession poserait un problème d'organisation de la filière : "Les jeunes diplômées préfèrent exercer dans de gros cabinets de ville et délaissent les postes dans l'agroalimentaire et les abattoirs, où les besoins de vétérinaires sont importants." 

Son collègue Jean-François Thony, le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature (ENM), où 80 % des effectifs sont féminins, se pose, lui, des questions presque philosophiques : "La justice doit être rendue par des personnes qui représentent la diversité de la société." Il vient donc de mettre en place une mission sur la "parité" à l'ENM, qui doit rendre des propositions concrètes en juin. Comme si la féminisation de la justice mettait en péril l'harmonie de la société... 


http://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/l-echec-scolaire-se-conjugue-au-masculin_1421461.html


"Comme si la féminisation de la justice mettait en péril l'harmonie de la société"  quand il y a beaucoups d'homme c'est "dominer par l'homme" ou " la profession doit être mixte pour mieux représenter la société ", trop de femme ne conduit-il pas a adopter des "stéréotypes" féminins ?

Quelques extraits du lien :

http://www.biop.cci-paris-idf.fr/upload/pdf/rapport-differences-sexes-r%C3%A9ussite-scolaire.pdf

 

Dans bon nombre de pays européens, il existe de nombreux projets et initiatives intéressants visant à lutter contre les stéréotypes sexistes dans les choix de carrière et à soutenir les

jeunes à l.’école grâce à une orientation systématique sensible à la dimension de genre concernant les études post-secondaires et les carrières auxquelles ils se destinent. Mais dans

la plupart de ces pays, il manque l'appui d’une stratégie nationale globale. Il semble qu.’il y ait un déficit d’initiatives ciblant spécifiquement les garçons.

 

Les politiques d’égalité des genres dans l.’enseignement supérieur mettent principalement l’accent sur la ségrégation horizontale

Dans la plupart des pays qui se sont dotés d’une politique d’égalité des genres dans l’enseignement supérieur, celle-ci a pour principal objectif de remédier

à la ségrégation horizontale et aux différents choix des filières d'études entre les femmes et les hommes. Presque toutes ces politiques et projets associés ciblent

uniquement les filles ou les femmes. Seule une minorité de programmes est orientée vers les choix d’études des garçons ou des hommes.

 

Les différences entre les genres en matière de réussite scolaire qui apparaissent le plus tôt sont les retards par rapport au niveau de la classe et les redoublements, et ils sont plus

courants chez les garçons.

 

Parmi les jeunes en rupture scolaire, on observe une proportion de garçons plus forte que celle des filles tandis que les filles sont plus nombreuses à obtenir un diplôme d.’enseignement

secondaire supérieur. Les filles obtiennent généralement de meilleures notes et un taux de réussite plus élevé dans les diplômes de fin d’études, ce qui facilite leur accès aux

programmes universitaires de leur choix. Toutefois, parmi les groupes défavorisés, un faible taux de réussite est observé à la fois chez les filles et chez les garçons.

 

En termes de contenu d’examen, les garçons réussissent bien mieux que les filles dans les questionnaires à choix multiples pour toutes

les disciplines, tandis que les filles ont des performances légèrement supérieures dans les évaluations portant sur le travail fait en cours et de type «rédaction» (Gipps et Murphy, 1994).

 

Depuis la fin des années 1970, comme nous l.’avons vu, les questions liées au genre en matière d’éducation étaient principalement axées sur les résultats et les aspirations des filles afin, justifiait-on,

de rééquilibrer le rapport d’autorité qui était plus favorable aux garçons et aux hommes. Mais avec la focalisation sur les performances aux examens ces dernières années et la réduction des écarts de

genre en faveur des élèves de sexe féminin, les débats sur l’égalité des sexes ont tendance à s’orienter aujourd’hui vers les «sous-performances des garçons» (OCDE 2001, p. 122). Ainsi, ces

dernières années, les questions de genre en matière d’éducation tournent, dans de nombreux pays, autour de la réussite aux examens relativement moins bonne des garçons et de la «crise de la

masculinité».

En 2006, des chercheurs affirmaient à propos de la Suède:

Les notes des garçons s’élèvent à 90 % environ du niveau des résultats des filles dans l’enseignement obligatoire, y compris dans le niveau supérieur obligatoire. Les filles, dans le cadre de la scolarité

obligatoire, obtiennent de meilleures notes dans toutes les disciplines à l.’exception de l’éducation physique et de la santé (Skolverket 2006a,p. 97).