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Sexe, salaires et performances

Un article de presse sur le sport http://ecosport.blog.lemonde.fr/2014/01/10/sexe-salaires-et-performances/

Sexe, salaires et performances

Le tout récent succès de la paire Cornet-Tsonga dans la Hopman Cup -la compétition de tennis qui fait du double mixte sa joute décisive- a certainement rempli d'aise Najat Vallaud-Belkacem qui s'apprête à défendre, à partir du 20 janvier, un nouveau projet de loi en faveur de l'égalité Homme-Femme. Elle a sans doute plus apprécié cette rafraîchissante victoire que les déclarations du footballeur Zlatan Ibrahimovic tandis qu’on le comparait, fin décembre, à la meilleure joueuse suédoise Lotta Schelin : « Non, mais c'est une plaisanterie ou quoi ?! ... On ne peut pas comparer la performance individuelle d’une femme avec celle d’un homme ». Il y a quelques années, les propos étaient encore plus crus. Ainsi, à la question « Pourquoi n'y a t-il pas de femmes dans le sport automobile ? », un célèbre constructeur de bolides et ancien pilote répondait qu'il manquerait toujours aux femmes quelque chose entre les cuisses pour aller chercher le dixième de seconde qui fait la différence ! Discours d'un autre temps... Mais au-delà  de ces propos colorés, est-il réellement impossible de comparer les performances individuelles d'une femme avec celles d'un homme ?

Les femmes 11,45 % moins rapides que les hommes

Si, dans le cadre du football, la comparaison suggérée par Ibrahimovic est en effet très délicate, il n’en n’est pas de même en athlétisme ou en natation. L’examen des records du monde masculins et féminins dans les principales épreuves de distances ou de sauts permet de situer la différence physiologique de manière objective. Pour les courses terrestres, les femmes sont entre 9,5 et 13 % moins rapides que les hommes (11,45 % en moyenne) ; dans l’eau, les femmes sont entre 7,5 et 13,5 % plus lentes (10,11 % en moyenne) ; enfin pour les sauts, elles sont entre 17 et 21 % moins performantes (18,9 % en moyenne).

La question que l'économiste ne manque pas, mécaniquement, de soulever est de savoir si les écarts de salaires entre sportifs et sportives sont en lien avec ces écarts de performance. Il lui est donné de constater que les dotations (les « prize money ») sont identiques pour les hommes et pour les femmes à l’occasion des tournois de tennis de Roland Garros et de Wimbledon (ce que ne manqua pas de critiquer le français Gilles Simon lors du dernier tournoi de Wimbledon, engendrant, là encore, une polémique considérable), mais en règle générale, les revenus des hommes sont supérieurs, ou très supérieurs, à ceux des femmes.

Le triathlon, champion de la parité ?

La chaîne ESPN a publié en 2011 un document recensant les revenus des sportifs, hommes et femmes, les mieux payés de leur discipline. On y découvre que la parité existe dans 3 sports : le ski alpin, le triathlon et le beach volley. En réalité, cette parité semble un peu artificielle dans le cas du ski alpin car ces données correspondent à la période de domination sportive et médiatique de Lindsey Vonn, championne olympique ayant particulièrement optimisé le gonflement de ses revenus en jouant sur son image (plus ou moins court vêtue). Ce type d’explications doit aussi être invoqué dans le cas du beach volley dont le succès télévisuel repose sur des gros plans suggestifs qui n’honorent pas plus les réalisateurs que les –très- nombreux téléspectateurs mâles. Finalement, c’est dans le cadre du sport extrême de l’effort et de la souffrance, le triathlon, que semblent se dissoudre les discriminations sexuelles.

Mais en dehors de ce qui ressemble à une exception, le ratio entre les ressources de la sportive et du sportif les mieux payés s’envole : il est de 1 à 2 en équitation et en tennis (grâce à la parité ou au rapprochement des « prize money »), de 1 à 3 en golf, de 1 à 4 en surf, … A l’extrémité de cette échelle de l’inégalité sexuelle se trouve le sport cher à Zlatan Ibrahimovic. Les revenus des footballeurs internationaux français se comptent en millions d’euros annuels (13 pour Benzema, 11,5 pour Ribery, 6,4 pour Evra… en 2012), ceux de leurs homologues du sexe faible en milliers... Ce rapport de 1 à 1 000 est, en vérité, en parfaite adéquation avec le montant des droits TV : 600 millions d’euros pour la Ligue 1 masculine, 150 000 euros pour la ligue 1 féminine (rapport de 1 à 4 000 !). Même si l’audience du football féminin est en progression, il est peu probable que les salaires de ces dames rejoignent un jour ceux de ces messieurs.

La différenciation sexuelle reste bien présente dans le sport, certainement ancrée sur la disparité des performances pures. Mais l'ampleur des écarts de revenus n'est pas uniquement justifiée par l'écart des performances. D'autres éléments (dont certains sont hautement subjectifs), participent à l'inégalité des revenus : professionnalisation moins avancée ou plus récente (cyclisme, saut à la perche), caractère moins spectaculaire des rencontres (football, tennis), inclination à la prise de risque plus faible (sports extrêmes)... Il est difficile d'établir si ces paramètres suffisent à justifier l'écart des rémunérations entre sportifs et sportives. En dernier ressort, c'est le consommateur de spectacle sportif qui est juge de paix : les rémunérations des uns et des autres dépendront toujours, finalement, de l'attractivité effective du spectacle proposé et cela nulle loi, nul décret, ne peut en décider...

Jean-Pascal GAYANT

 

Un article qui propose une analyse différente en comparaison a ce qui peut être lu ou entendu sur le sujet.

Une discrimination de 108 ans : http://www.lemonde.fr/natation/article/2015/07/30/les-mondiaux-de-natation-synchronisee-s-essaient-a-la-mixite_4704506_1616665.html Le titre est moins accrocheur que lorsque c'est une femme qui fait un sport ou une activité dont les hommes son majoritaire :  dans un univers de macho, un bastion masculin bref les expressions  de la misandrie. 

 

Un article sur le salaire et le sport un exemple avec le foot :

http://hommelibre.blog.tdg.ch/archive/2017/05/29/les-hauts-et-les-bas-du-girl-power-2-matilda-284351.html#more

« … on compte en France 55.000 licenciées à la Fédération française de football, soit moins de 3% de l'effectif total ; la Coupe du monde féminine qui se tient en ce moment  en Allemagne génère 51 millions d’euros de chiffre d’affaires, contre huit fois plus pour le Mondial de 2006 ; les places se sont vendues quasi exclusivement en Allemagne alors qu’en 2006, 1,4 millions d’étrangers s’étaient déplacés pour assister aux matches des hommes. »